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« La copropriété dégradée, le relogement et après ? Professionnels et habitants dans une opération rénovation urbaine » par HABOUZIT Rémi

Discipline : sociologie, démographie, Laboratoire : CProfessions, Institutions, Temporalités – PRINTEMPS

Résumé
Depuis 2003, plus de 400 quartiers populaires classés en Zones Urbaines Sensibles (ZUS) et 4 millions d’habitants sont devenus
les destinataires d’un Programme de Rénovation Urbaine (PRU) instauré par la « loi Borloo » d’orientation et de programmation
pour la ville. Dans un objectif de transformation des quartiers et de mixité sociale, ces programmes entraînent des opérations de
démolition/reconstruction de logements, la réhabilitation du parc existant et la redéfinition des espaces urbains collectifs (voirie,
espaces verts, etc.). Les communes de Clichy-sous-Bois et de Montfermeil en Seine-Saint-Denis font l’objet d’un de ces PRU. Tout
en étant le plus important de France (en termes de budget et de logements détruits), il a aussi la particularité d’entraîner la
démolition d’immeubles en copropriétés privées dégradées : les Bosquets à Montfermeil et la Forestière à Clichy-sous-Bois. À leur
place, toutes les nouvelles constructions et les relogements se font dans le parc social. L’ensemble des habitants relogés passe
donc du statut de propriétaires occupants ou locataires du parc privé à celui de locataires du parc social. Outre ce changement de
statut résidentiel, cette situation s’accompagne de la mise en interactions régulières de ces « délogés » aux professionnels (de la
ville, associatifs et des bailleurs) qui interviennent sur ce quartier, dans ces immeubles dans le cadre d’accompagnement pré et
post relogement. Basée sur une enquête conduite par entretiens, observations et archives, cette thèse vise autant à saisir la
genèse de cette politique, que les effets de la volonté de transformation des quartiers, par la généralisation du parc social, sur les
pratiques professionnelles et les trajectoires des habitants relogés. Dans cette optique, les archives et les entretiens donnent à
comprendre que la dégradation des anciennes copropriétés s’explique en priorité par leurs conditions de commercialisation, de
production et de gestion. Or, toutes les mesures d’actions publiques, jusqu'à la signature du programme de rénovation urbaine,
présentent systématiquement les habitants et leurs caractéristiques (populaires et immigrées) comme les principaux responsables
de cette dégradation. L’ethnographie des pratiques professionnelles illustre ensuite comment dans les résidences neuves, ces
acteurs se servent des interactions avec les habitants pour encadrer leurs manières d’habiter. Ce travail se faisant dans l’idée
d’éviter une nouvelle dégradation des bâtiments. Enfin, les entretiens auprès des habitants (réalisés avant et après relogement)
dévoilent comment le relogement et la rencontre avec les professionnels les déstabilisent dans leurs ancrages individuels et
ébranlent le sens des hiérarchies internes à ce groupe social. Alors que les anciens propriétaires constituaient dans la copropriété
la frange supérieure de ce groupe, ils sont aujourd’hui ceux qui se sentent le plus déclassés. À l’inverse, les locataires qui dans la
copropriété occupaient les positions les plus dominées sont aujourd’hui les plus réhabilités. Au-delà des résultats empiriques, ces
pistes analytiques situent les enjeux de la thèse à plusieurs échelles. D’abord, c’est dans une perspective constructiviste que ce
travail illustre comment ces copropriétés et leurs occupants ont été construits comme un problème et une catégorie d’action
publique. Ensuite, c’est en partant de la pratique des professionnels que cette thèse dévoile comment dans l’espace de la politique
de la ville se maintiennent des formes d’encadrement et de domination à l’égard de certains publics cibles (ici issus des catégories
populaires et immigrées). Enfin, cette thèse s’inscrit dans une sociologie des classes populaires autant attentives à leurs
différences internes qu’aux modalités de réception variée d’une mesure d’action publique.

Abstract
Since 2003, more than 400 popular districts categorized as sensitive urban zones and 4 million inhabitants have become part of a
program initiated by the Framework Act on Town Planning and Urban Renewal (so-called “Borloo law”). In order to achieve district
transformation and social diversity, the program has led to demolition/rebuilding operations, the refurbishment of existing dwellings
and the redefinition of public urban areas (street network and green spaces, etc.) The municipalities of Clichy-Sous-Bois and
Montfermeil in the Seine-Saint-Denis region were part of this program. Whilst being the largest program in France (in terms of
allocated budget and demolished dwellings), it also had the singularity to involve the destruction of dilapidated privately-owned
buildings such as Les Bosquets in Montfermeil and La Forestière in Clichy-sous-Bois. All the new buildings reconstructed there are
under social housing management. All re-housed inhabitants consequently moved from the status of owner-occupiers or private
housing tenants to that of social housing tenants. In addition to their change in status, this situation implies regular interactions
between these ‘displaced’people and the professionals (of the city, of nonprofit organizations, social landlords who operate in the
area, in these buildings within the frame of pre- and post-rehousing accompaniment. Based on an analysis supported by interviews,
observations and archives, this thesis aims at understanding the genesis of this policy as much as the effects of the will for district transformation through generalizing social housing, on professional practices and the trajectories of the re-housed inhabitants. To
this end, archives and interviews help understanding that the degradation of the former co-ownership properties was attributable
primarily to their conditions of marketing, construction and management. Yet, all the measures of public action, up to the signature
of the urban renewal program, systematically present the inhabitants and their features (popular classes or migrants) as solely
responsible for this deterioration. The ethnography of professional practices then shows how in the new homes the professionals
use the interactions with the inhabitants to regulate the way they live there. This work is done with a view to avoiding new damage
to the buildings. Eventually the interviews with the inhabitants (made before and after re-housing) illustrate how re-housing and the
interactions with professionals destabilize them within their individual anchorages and shake the sense of hierarchies within this
social group. While former owners made up the upper class in their previous housing, they now feel the most downgraded.
Conversely, tenants who were the most dominated are today the most rehabilitated. Beyond empirical results, this analytical
approach rates the issues of the thesis on sevral scales. First, this work illustrates how, in a constructivist perspective, these
co-ownership properties and their inhabitants have been built as a problem and a category of public action. Then, starting from the
practices of professionals, this thesis discloses how within the frame of urban policy, some forms of regulation and domination over
certain targeted publics (here working classes and migrants) are still exerted. Finally this thesis is consistent with a sociology of
popular classes who are attentive to their internal differences as much as to the various ways a measure of public action can be
perceived.
Informations complémentaires
Laurent WILLEMEZ, Professeur des universités, université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines - Directeur de these
Sandrine NICOURD, Maître de conférences, Université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines -Directeur de these
Agnès DEBOULET, Professeur des universités, Université de Paris 8 - Rapporteur
Delphine SERRE, Professeur des universités, Université de Paris Descartes - Rapporteur
Jacques DE MAILLARD, Professeur des universités, Université de Versailles Saint Quentin en Yvelines - Examinateur
Sylvie TISSOT , Professeur des universités, Université de Paris 8 - Examinateur
Contact :
DSR - Service SFED :